Ils ont piqué au vif les amoureux de rock, glissant par surprise un venin rebelle dans leurs veines. Scorpions n’est pas un groupe comme les autres : il a changé la donne, allant jusqu’à, dit-on dans les fables les plus élogieuses, booster le taux de natalité en Europe.
Quand le scorpion apparaît, même les plus téméraires ont un mouvement de recul. L’animal, sauvage et coriace, effraie par son venin, mais passionne par son agilité, sa beauté et son sang-froid. C’est un peu la même chose avec Klaus Meine et Rudolf Schenker, tant les maîtres d’Hanovre ont piqué par surprise les aficionados du hard-rock. Leurs ballades ont bousculé les cœurs, illuminé le monde et enchanté les premiers amours de générations entières.
Riffs puissants, hymnes fédérateurs, mélodies subtiles : contre toute attente, Scorpions est un artifice de douceur dans un monde de brutes. Le groupe forge les espoirs, abat les crispations et a nourri les flirts des post-adolescents. Combien de trentenaires révolus sont le fruit d’un Still Loving You ? Oui, ces enfants terribles de l’Allemagne de l’Ouest, sous leur carapace de cuir, semblent avoir donné des ailes à certains.
Il faut dire qu’à l’écoute de leurs tubes les plus emblématiques, vivre d’amour et d’eau fraîche prend tout son sens. A-t-on vraiment besoin de plus pour apprécier ce gros son, cette pêche d’enfer et cette légèreté paradoxale ? Chaque note est un coup de foudre. Show enflammé, énergie séductrice, refrains imparables : sous des sonorités à faire bugger l’espace-temps, les patrons de Basse-Saxe, influencés par les envolées de Led Zeppelin et la hargne de Deep Purple, continuent de faire valser les ombres et danser les briquets.
Hanovre, à l’ouest du mur de la honte. De jeunes adolescents insouciants sortent d’une fête arrosée. Ce jour-là, du verre aux trois quart vide naît Scorpions. Sous l’impulsion de Rudolf Schenker, le groupe joue des reprises en anglais, généralement issus des charts britanniques. En tête de gondole : les plus beaux tubes des Beatles, alors à l’apogée de leur carrière.
L’arrivée de Klaus Meine au chant va modifier le cours des choses. Le groupe change de cap et compose un premier album de rock psychédélique, intitulé Lonesome Crow. Scorpions commence à rencontrer un certain succès en Allemagne, mais passe complètement inaperçu ailleurs.
Après quelques changements de line-up, la bande à Klaus Meine et Rudolf Schenker entame sa formidable aventure sur l’asphalte du hard-rock. Scorpions commence à se faire un nom en Europe, mais c’est surtout la sortie de Virgin Killer, en 1976, qui va faire sortir le groupe de l’ombre. Même le Japon tombe sous le charme !
C’est un tremblement de terre ! Le single Still Loving You culmine des semaines en haut des charts. Plus qu’une chanson, c’est un hymne à l’amour reprise en chœur par le monde tout entier. Scorpions entre dans la légende, avec un morceau qui, dit-on, a eu un effet surprenant sur le taux de natalité de certains pays. En France, le groupe marque les esprits et l’histoire : le 29 février, ils inaugurent Bercy en devenant le premier groupe international à s’y produire en concert.
C’est un événement historique, le monde est en effervescence : non, ce n’est pas un rêve, le mur de Berlin est bel et bien tombé. Alors, forcément, ça ne laisse pas Scorpions, le plus grand groupe allemand, indifférent. Les génies d’Hanovre enregistrent dans la foulée le titre Wind of Change. Sa mélodie sifflée fait un tabac. C’est un carton mondial !
Scorpions fait ses adieux avec une tournée aux quatre coins du monde. Mais c’était sans compter sur leur amour inconditionnel de la scène. Quelques mois plus tard, le groupe annonce l’enregistrement d’un nouveau disque. Scorpions is back : c’est certain, la bande de Klaus Meine et Rudolf Schenker a mis la retraite au placard, allant même jusqu’à intégrer, en 2016, Mickkey Dee, le batteur de Motörhead en son sein.