Costume criard, cheveux gominés, voix puissante : Chris Isaak, enfant des sixties bercé par la fougue d’Elvis, nage à contre-courant, pour célébrer un rock au parfum d’autrefois. Ce crooneur de Californie, optimiste par nature, se joue du spleen ambiant pour bâtir un empire musical hors du commun.
Hors des modes, Chris Isaak, digne héritier de Dean Martin, de Bing Crosby et du grand Elvis Presley, est un vent contraire, figeant le temps avec grâce. Ce cowboy contemporain, prêt à dégainer sa Gibson J-200 d’occasion à la moindre émotion, se moque éperdument des tendances et des époques. Sourire charmeur, coiffure aérodynamique, vêtements aux couleurs électriques : le diamant brut de Stockton, ville discrète de Californie, pose sa voix suave et langoureuse sur des mélodies de velours, dans la lignée de ses héros d’enfance, comme Leadbelly et Hank Williams, qu’il écoutait jadis sur un vieil électrophone tout juste fonctionnel.
D’une certaine manière, Chris Isaak, issu d’une famille très modeste, a toujours eu un train de retard, et là se cache tout le paradoxe. Car le crooner américain, ancien boxeur de talent, dont le nez porte encore les stigmates, frappe toujours à la bonne heure, et sans prévenir, pour se défaire de la masse avec des tubes sortis de nulle part, auxquels personne ne croyait. Blue Hôtel était annoncé comme un échec commercial par son label de l’époque, Wicked Game comme un naufrage : ils sont devenus des succès planétaires. Oui, cet amoureux indéfectible de Roy Orbison, qui se définit lui-même comme la médiane entre un poète et un redneck, aurait pu retomber moult fois dans l’oubli. Mais l’héritage qu’il porte, et sculpte depuis les eighties, est son point d’équilibre : Chris Isaak ne tombera jamais.
Ainsi, toujours de bonne humeur, ce dandy extravagant par nature, cassant avec les codes du politiquement correct, ressuscite à merveille l’esprit des sixties, en lui injectant une dose de modernité intemporelle. Frugalité, sérénité, romantisme : Chris Isaak joue avec les adjectifs pour transformer ses aventures et anecdotes en un hommage émouvant et énergique au rockabilly de toujours.
Chris Isaac se fait repérer par Warner Bros Records, sur lequel il sort son premier album. Si le disque est bien reçu par la critique, sur le plan commercial, l’échec est dur à avaler. Mais, l’année suivante, le salut inespéré vient de France. Chris Isaac réussit son pari : le titre Blue Hotel, issu de son deuxième album, fait un carton, d’abord dans l’Hexagone, puis partout à travers le globe.
Sa carrière ralentit dangereusement. Son label s’apprête à lui tourner le dos. Alors que la sortie de Heart Shaped World semble être un échec, le réalisateur David Lynch va tout changer. Le titre Wicked Game est sélectionné pour apparaître dans la bande originale du film Sailor and Lula. Le succès est planétaire. Quand on vous dit que Chris Isaak rebondit toujours…
En parallèle de sa carrière musicale, Chris Isaac apparaît dans plusieurs films. En 1991, il incarne un policier du SWAT dans le Silence des Agneaux. S’en suivent des apparitions plus ou moins remarquées dans, notamment, Twin Peaks, Friends ou A Dirty Shames.
Chris Isaac dévoile son cinquième album, unanimement apprécié par ses pairs. Il est nommé à deux reprises aux Grammy Awards et est certifié album de platine. La folle aventure de l’enfant de Stockton, fils d’ouvriers mélomanes, continue.
Rongé par une mystérieuse maladie pulmonaire, Chris Isaac peine à maintenir le cap. Les pronostics des médecins sont mauvais. Pourtant, une fois de plus, Chris Isaac, en optimiste combattant, gagne par K.O. Quelques mois plus tard, le chanteur américain revient sur scène, avec un passage remarqué à l’Olympia de Paris.