Dans le tiercé du grunge américain, Pearl Jam tient la corde, au coude-à-coude avec Kurt Corbain, dieu de Nirvana, et Alice in Chains. Ça sonne fort et énervé. Oreilles fragiles, s’abstenir : ici, c’est le temple d’un rock sans sommation, ni artifice.
Sans maîtrise, la puissance n’est rien. Pearl Jam, groupe aux riffs affutés et à l’énergie contagieuse, connaît bien le dosage : un subtil mélange entre la brutalité du gros son et la tranquillité trompeuse de jolies ballades. Ainsi, à Seattle, terreau fertile de la culture underground des nineties, le groupe d’Eddie Vedder, frontman reconnaissable à sa chemise à carreaux façon countryside et à son timbre de voix chaud, a mis une claque à la génération MTV. Il faut dire que son rock intègre et incisif donne la pêche et fait bouger les stades.
Pearl Jam n’est pas là pour enfiler des perles, mais pour porter un lourd et beau héritage, comme les derniers survivants d’une folle et grande époque, où le grunge sortait de terre pour faire fleurir les frustrations du monde moderne. Paroles inspirées, airs torturés, solos efficaces aux portes du heavy metal : ces gars-là ont toujours su faire coïncider la force de la gratte et leurs idéaux de citoyens résolument engagés. Car Pearl Jam, insoumis et désinvolte, n’a pas sa langue dans sa poche, osant taper du poing sur la table pour prôner ses convictions humanistes.
Des années plus tard, son énergie paraît intacte, capable, comme hier, de tout écraser sur son passage. Rien ne résiste à Pearl Jam : ni les idées conservatrices, ni les âmes sensibles. À mesure que les décennies passent, l’évidence se fait entendre : Pearl Jam est une perle rare.
Suite au décès d’Andrew Wood, Chris Cornell décide de fonder le groupe Temple of the Dog. Son souhait : rendre hommage à son copain disparu. Mais progressivement, le projet va prendre de l’ampleur et devenir Pearl Jam. Le premier disque, Ten, bouscule les critiques : c’est déjà un immense succès !
Son plus agressif, le disque Vs vient confirmer le talent de la bande à Eddie Vedder. Ça passe en boucle sur MTV et ça donne envie de tout casser : les charts s’enflamment. La presse se déchire, entre les adeptes et les fervents opposants à ce grunge d’un nouveau genre. C’est à cela, dit-on, que l’on distingue les groupes qui marquent réellement leur époque.
Mirror Ball n’est pas un album comme les autres. Pour la premières fois, Neil Young décide d’enregistrer avec les membres de Pearl Jam. C’est un grand moment pour le groupe. Car le songwriter de Toronto est une légende qui, avec sa voix haut-perchée et sa guitare en bandoulière, a apporté une couleur nouvelle au monde libre de l’après Woodstock.
Après une décennie moins fructueuse au niveau des ventes, Pearl Jam renoue avec le haut des charts, grâce au magnifique album Backspacer. C’est un renouveau pour le groupe, avec un son plus brut et des solos plus discrets. Place à l’efficacité avant tout ! Ça va droit au but et ça sonne fort : la flamme d’Eddie Vedder ne s’est jamais éteinte, elle s’est simplement légèrement recroquevillée pour mieux briller.
Près de trente ans après son premier album, Pearl Jam est de retour avec Gigaton. S’il fallait une preuve que le grunge ne meurt jamais, la voici. Le magazine Rolling Stone est sous le charme. Il écrit : « Pearl Jam montre qu’il a plus que du savoir-faire à offrir et qu’il a envie d’en découdre ». C’est une évidence : ces gars-là, en provenance de Seattle, ont encore une bonne dose d’énergie à revendre !