John Fogerty fait partie des légendes du rock des années 60 et 70, et si son nom est moins connu que d’autres, c’est parce que ce chanteur et compositeur, rockeur dans l’âme et jusqu’à la dernière goutte de sang, cultive aussi une vertu rare dans le milieu, la discrétion. Pourtant, c’est bien lui qui a été intronisé au Rock and Roll Hall of Fame avec son groupe qu’on ne présente plus, Creedance Clearwater Revival (CCR). Et c’est bien lui que le magazine RollingStone a classé à la fois parmi les cent meilleurs chanteurs et les cent meilleurs guitaristes rock du monde. Rien que ça !
Né en Californie, il incarne pourtant une musique rock qui prend ses racines dans les terres isolées du bayou. Une musique aussi intègre que l’est l’homme lui-même et qui puise dans une tradition où les guitares se jouent au coin du feu, perdues dans l’immensité sauvage des marais. Un rock qui se mêle avec précision au blues, au rockabillly ou à la country, porté par une voix puissante, parfois un brin nostalgique et fataliste. Parce que John Fogerty aime la musique mais choisit avec soin ses combats, doutant dans ses jeunes années de pouvoir être le moteur de changements majeurs.
Il est comme ça, ce vieux briscard du rock, les deux pieds sur terre, la tête dans des mélodies qui ont fait le tour de la planète et qui l’ont porté en haut des charts. Et si aujourd’hui les cheveux ont blanchi, les rides se sont alignées, il n’a rien perdu de sa soif d’écriture, de son besoin de liberté, de son goût pour la justice. Ses chansons continuent de parler à tous, d’inspirer, de raconter des histoires sur des rythmes qui puisent dans un rock classique, devenu avec le temps universel et intemporel.
Aujourd’hui libéré d’un combat qui lui a pris des années – récupérer les droits d’auteurs des chansons qu’il a écrites dans sa première vie avec CCR – il se dit prêt à prendre la route une nouvelle fois. A 77 ans, il déclare, « je suis impatient d’avoir de nouvelles idées et un intérêt renouvelé pour ma musique… comme un renouveau ». Signe que le rock est bel et bien l’un des élixirs de la jeunesse éternelle.
Ils s’appelaient les Golliwogs, ils ont finalement changé de nom pour Creedance Clearwater Revival, un nom qui a marqué l’histoire du rock avec des titres en forme d’hymnes pour une liberté dénonciatrice. Proud Mary, Fortunate Son, Bad Moon Rising sont autant de tubes qui ont marqué les années 60 et 70 et inspiré toute une jeunesse. A la composition et au chant, John Fogerty, évidemment. Le groupe connaîtra un succès mondial avant de se dissoudre, en 1972.
Dès la dissolution de son groupe, John Fogerty reprend la musique à sa manière : dans un travail perfectionniste et acharné. Il sort en 1975 son premier album éponyme, en solo mais ne retrouve pas le succès qu’il avait connu avec CCR. En 1976, il récidive pourtant avec Hoodoo. Là encore, ses titres peinent à se faire une place dans les charts. Déçu, le chanteur reconnaît que sa musique n’est pas complètement à la hauteur et demande à sa maison de disques de détruire les bandes. Pendant presque 10 ans, l’artiste ne donnera plus de nouvelles. Il a cependant encore des choses à dire.
Une petite traversée du bayou plus tard, John Fogerty revient enfin à la musique. Sorti en 1985, son album Centerfield met cette fois tout le monde d’accord. La chanson-titre est un véritable hymne au baseball, sport favori du chanteur. Elle investit rapidement les ondes radio ainsi que les terrains de jeux et le génial guitariste revient en grâce auprès de son public et de la presse musicale. Ça sonne rock, un poil blues et avec The Old Man Down the Road, il finit d’embarquer les plus jeunes comme les nostalgiques !
C’est en 1993 que CCR est intronisé au Rock and Roll Hall of Fames, mais les tensions entre les membres du groupe subsistent et le groupe s’y produira sans son leader. Ce dernier préfère se concentrer sur sa carrière solo et sort quatre ans plus tard l’excellent Blue Moon Swamp. Là encore, personne ne s’y trompe et l’album remporte un Grammy Award dans la catégorie meilleur album rock. Dans la foulée, l’artiste part dans une tournée d’anthologie, jouant pour la première fois depuis qu’il fait cavalier seul les titres les plus connus de sa carrière, ceux de CCR.
C’est un John Fogerty qui brille d’une lueur nouvelle que nous retrouvons en 2023. Après une série de concerts de charité pour aider les enfants pendant la pandémie de Covid, l’artiste gagne une bataille judiciaire qui courait depuis des années et récupère les droits sur les chansons qu’il a écrit pour CCR. Enfin ! Une victoire et une reconnaissance qui donne de nouvelles envies à l’artiste qui approche les 80 ans mais qui a conservé une étincelle adolescente. Une tournée d’abord, un album ensuite ? « Il y a certainement plus à venir » déclarait-il au magazine Rolling Stone. Alors on attend et on croise les doigts.