Si ses cheveux ont blanchi, ses boucles et sa passion pour la musique n’ont pas pris une ride. Car celui qui répond au titre de dernier des ménestrels défie le temps dans sa quête sans fin de musicalité. Explorant désormais les rythmes et les sonorités du début du dernier millénaire, il se définit volontiers lui-même comme un artiste anachronique, de niche, malgré les milliers d’albums vendus de notre côté des Alpes.
Car les créations d’Angelo Branduardi puisent leurs inspirations dans des temps oubliés autant qu’ils racontent des souvenirs lointains, du temps des bals folks. Pour lui, ces accords inspirés par le Moyen-Âge sont « les racines de la musique […] et les racines profondes ne se gèlent jamais ». Son violon accroché au corps, il raconte le plus souvent en français une prose lyrique et romanesque, adaptée par son compagnon de toujours Etienne Roda-Gil, puis, plus surprenant, par Carla Bruni après le décès de ce dernier.
Peu friand d’interviews, il devient pourtant intarissable lorsqu’on l’interroge sur les chamans, dont la musique a été créée pour parler à Dieu. Une poursuite de cet art quasi-insaisissable, qu’il qualifie du « plus abstrait, du plus proche de l’absolu » et qui l’a mené à s’inspirer des grands chanteurs français comme Jacques Brel ou Georges Moustaki comme des artistes internationaux Donovan, Cat Stevens ou Bob Dylan.
Un mélange détonnant que le dernier des bardes complète aujourd’hui avec des acoustiques plus spirituelles, comme celles d’Arvo Pärt. Tout son génie résidant, comme depuis ses débuts, dans l’alchimie subtile entre héritage et modernité.
Originaire du nord de l’Italie, c’est à Gênes que le jeune Angelo Branduardi étudie le violon au Conservatoire Niccolò Paganini. A 16 ans, il en sort avec un Premier Prix et débute sa carrière musicale comme soliste dans l’orchestre du Conservatoire. Déjà à l’époque, il explore et puise ses inspirations dans les folklores méditerranéen ou yiddish.
Angelo Branduardi attendra la trentaine pour se faire connaître dans l’hexagone avec deux disques d’or. En 1979 avec La Demoiselle mais surtout avec Va Où Le Vent Te Mène en 1980. Artiste solitaire et anticonformiste, ses albums font figures d’ovnis poétiques et dansants dans un monde alors englouti par la vague disco.
Plus discret dans les années 80 où il se consacre surtout aux musiques de films, il revient sur le devant de la scène avec une série baptisée Futuro Antico. « Je me suis dit que l’on pouvait avoir un futur ancien. Un pas en arrière pour faire deux pas en avant. » explique Angelo Branduardi. Originellement pensée comme une revue musicale en langue ancienne, le succès surprend l’artiste qui en fait finalement un album. Il sera suivi de trois autres opus qui font la part belle aux sonorités de la Renaissance.
Au début des années 2000, Angelo Branduardi avait déjà réalisé un album-spectacle sur saint François d’Assise. Il disait alors « la musique dévotionnelle, ce n’est pas ce que j’aime. Mais il s’agissait plutôt de faire quelque chose à destination de tous, croyants ou non-croyants ». A 70 ans, loin de se reposer sur ses lauriers, le troubadour poursuit cette recherche spirituelle avec un album intitulé Les Chemins de l’âme, dans lequel il explore en musique les écrits de sainte Hildegarde de Bingen.